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Les dits de dames
5 avril 2012

Histoire de goût

Carottes à l'insolente couleur criarde, au détestable goût doucereux...ô pauvres carottes innocentes, pourquoi tant de haine ?

Ma mother d'amour eut un matin la révélation du siècle en contemplant, effondrée, la masse orangée de ces satanées carottes s'entassant dans le cellier.

- Et si je faisais de la confiture !? s'exclama la brave femme.

La voilà s'activant fiévreusement devant ses fourneaux, épluchant les légumes rigolards, les coupant en rondelles imbéciles et les jetant dans sa bassine en cuivre. Une pointe de sel, qq kilos de sucre et la racine orange céda en un épais jus sucré où surnageaient moult fibres récalcitrantes. Dans des pots en verre sentant bon le propre, l'astucieuse cuisinière versa son mélange fumant, tassant bien le tout, toute fiérote de sa créativité.

- Mes filles, assurément, se délecteront de cette nouveauté, pensa-t-elle.

Dès le lendemain matin, au petit déjeuner, notre chère mère exhiba le premier pot orange et l'ouvrant devant nous, nous exhorta à étaler l'étrange pâte sur nos tartines. Perplexes mais déjà méfiantes nous nous exécutâmes.... Pauvres de nous, pauvre de moi, dès la première bouchée avalée, un haut le coeur incoercible étrangla ma gorge, m'avertissant de la dangerosité de toute prochaine introduction supplémentaire dans mon gosier. Hélas... pour persuader notre mère que sa confiote était une infâme concoction dont même un clochard ne voudrait point pour pitance après une période de jeun forcé, ce fut plus difficile... et nous dûmes avaler des jours durant ces odieux légumes travestis en confiture sucrée, légumes qui déjà, en temps ordinaire, sont répugnants à l'état cuit.

Ô carottes, carottes... simples racines potagères, que n'êtes-vous restées à l'état décoratif avec vos fanes et vos ombelles ....? Vous auriez ainsi épargné à trois gamines le dégoût à jamais de votre parfum douceâtre, confiture extraordinaire s'il en fut, étonnant moment de notre enfance gastronomique...

Lhanne - 5 avril 2012

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Commentaires
R
Oh, voici donc l'origine du traumatisme alimentaire, pauvres carottes...
Les dits de dames
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